La serveuse — Le double expresso, c’est pour vous ?
Moi — Oui. Pourriez-vous m’en rapporter un autre dans quinze minutes ?
La serveuse — Euh… Oui, sans problème.
Moi — Merci, j’ai vraiment besoin d’une forte dose de stimulants psychotropes en ce moment.
La serveuse — Ha ha ha… euh… ok.
Troy — (Dès que la serveuse tourne le dosé) Tu as vraiment mauvaise mine, ma chère.
Moi — Tu parles ! Tu as vu les cernes sous les yeux ?
Troy — Qu’est-ce qui se passe ?
Moi — Ça fait deux semaines que je dors mal et c’est en grande partie à cause de Roxane.
Troy — Tu ne devrais pas prendre ses problèmes sur tes épaules.
Moi — Évidemment que je ne devrais m’en querisser de ses problèmes, mais il faudrait que le mémo se rende jusqu’à mon subconscient ! Je n’arrête pas de rêver à elle, nuit après nuit.
Troy — Pour vrai ?
Moi — Cette nuit, par exemple, j’ai rêvé qu’elle avait réussi à garer son pickup dans mon salon, entre le sofa et ma table à café.
Troy — Ha ha ha !
Moi — Elle était au volant et moi, je lui faisais des signes pour la guider, pour qu’elle sorte par la porte patio… sauf qu’elle renversait tout avec son truck, mes bibliothèques, ma télé, tout le bazar… pendant qu’elle se contentait de répéter : « Ch’tu correct ? J’crampe en masse… Ch’tu correct ? J’crampe en masse ».
Troy — HA HA HA HA ! God, this is hilarious !
Moi — Ouain. Dans le rêve, par contre, je ne trouvais pas ça drôle pantoute.
Troy — C’est ton inconscient qui te montre à quel point tes efforts pour dealer avec les problèmes de Rox ont pour seuls résultats de scraper ton intimité.
Moi — Oh wow. Merci Docteur Freud, je ne serais jamais arrivée à comprendre ça toute seule.
Troy — Viens-tu de m’appeler « Doctor Fraud » ?
Moi — Ha ha ha ! Elle est bonne celle-là !
Troy — Elle est vieille, surtout.
Moi — C’est la première fois que je l’entends, alors je te félicite quand même !
Troy — Parlant de rêves, tu as envie que je te raconte celui que j’ai la nuit dernière ?
Moi — Je suis toute ouïe, chéri.
Troy — J’ai rêvé que j’étais à la Place Aubry, pas loin des 4 Jeudis. C’était l’été et il y avait du monde en querisse. Dans la foule, il y avait un homme qui marchait, nu. Il n’était visible que par intermittence, comme une apparition surnaturelle, entre les rangs entrelacés de marcheurs en veston-cravate, en jeans déchirés, en robe soleil, en costume de clown et en uniforme de milice d’extrême droite.
Moi — Ne me dis pas qu’Atalante te poursuit jusque dans tes rêves !
Troy — Je te parle d’un type nu en public et tu accroches sur les fascistes ?
Moi — C’est pas ma faute : ce sont eux que je trouve choquants.
Troy — Ouais, tu as raison. Toujours est-il que l’homme nu ne provoquait aucune émotion, pas même un seul regard amusé ou agacé; il ne choquait personne.
Moi — Tu vois, même ton rêve était de mon avis.
Troy — C’était bizarre, parce qu’en plus il était très beau. Ses muscles bougeaient gracieusement, ses fesses et ses mollets se tendaient en alternance comme une mécanique parfaitement huilée et ajustée. Sa bite était toute mignonne et sautillait entre ses cuisses poilues. Et son visage… God, il était du genre qu’on voudrait spontanément embrasser.
Moi — Aon !
Troy — Et ce n’est pas tout. J’ai ensuite remarqué qu’assise à la table du coin de la terrasse des 4 Jeudis, il y avait une femme, nue elle aussi. Elle lisait le journal et sirotait un café.
Moi — Comme on fait en ce moment.
Troy — Oui. Sa nudité était tout aussi attirante que celle de l’homme qui marchait ; ses seins étaient denses et mûrs, ses jambes généreusement galbées et surtout, son regard laissait transparaître l’intensité de ses désirs. Un visage plein de sensualité, quoi.
Moi — Ses cheveux étaient de quelle couleur?
Troy — Pardon ?
Moi — Elle était blonde ? Brune ? Rousse ?
Troy — Quelle importance ça peut avoir ?
Moi — J’essaie de faire la Docteure Fraude à mon tour, c’est tout.
Troy — Dommage, parce que je ne me souviens plus.
Moi — Ah zut.
Troy — Enfin bref. Son visage était aussi du genre qu’on voudrait spontanément embrasser, comme celui de l’homme qui marchait, mais pour des raisons différentes et beaucoup moins avouables tant qu’elle transpirait le sexe. En levant les yeux de son journal, la femme nue a aperçu l’homme nu qui se frayait peu à peu un passage dans la foule. Elle s’est mise à le dévisager avec une expression de stupeur et lui, s’est mis à courir dans sa direction. C’est à ce moment précis que j’ai pris conscience de ma présence dans cette scène. Je crois que j’étais un serveur, parce que je tenais un plateau sur lequel était déposé une rose noire. Je me suis senti envahi par le coup de foudre ; c’était l’amour, le pur, le vrai – mais je me suis réveillé avant de savoir lequel de ses deux êtres était l’objet de mon amour.
Moi — Wow. C’est… stupéfiant.
Troy — Alors, docteure, quel est ton verdict ?
Moi — (En vidant d’un trait mon expresso refroidi.) Mon verdict est que non seulement tes rêves sont plus intéressants que les miens, mais aussi que tu es vraiment meilleur que moi pour les raconter.
en tous cas vous les ecrivez tres bien…comme secrétaire médicale,,je vous vois un avenir…
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