(Le téléphone sonne.)
Moi — Allô ?
Nicole — Bonjour ma chérie !
Moi — Salut maman.
Nicole — Comment vas-tu ?
Moi — Ça roule. Et toi ?
Nicole — Oh moi, je suis en train de préparer mon départ pour la Floride, mais aussi – et surtout – Festivus.
Moi — (Soupire.) Tu sais que tu as le droit de dire «Noël », han.
Nicole — On a déjà eu cette discussion, ma chérie.
Moi — Je crois que tu es la septuagénaire la plus fan de Festivus que je connaisse.
Nicole — Quand on a été élevée chez les bonnes sœurs, c’est normal d’avoir de la rancœur envers le catholicisme et Nowel en particulier. Alors si en plus on peut s’amuser en se déchristianisant, ça rend la laïcité cool et ludique.
Moi — Contrairement à la loi 21.
Nicole — On a déjà eu cette discussion, ma chérie.
Moi — Ok boomer.
Nicole — Quoi ?
Moi — Laisse tomber. Cette blague est trop novembre 2019 de toute façon. Cela dit, ce serait le fun que l’aspect anti-consommation de Festivus t’intéresse autant que son côté laïcité, par contre.
Nicole — Tu lis dans mes pensées, ma chérie. Lou m’a raconté en long et en large à quel point elle veut une guitare rouge comme son idole.
Moi — Ouais. Comme Cobain. Une Fender Jaguar, je crois.
Nicole — C’est ça !
Moi — Je te vois venir. Ça coûte la peau des fesses et je t’interdis de lui acheter.
Nicole — Et bien, c’est un peu tard pour les interdictions. Je me suis déjà arrangée avec Simone, qui va en payer la moitié et ton amoureux qui s’occupe de l’acheter.
Moi — Mais c’est une conspiration !
Nicole — Mais non, mais non. Et puis, ça va lui faire tellement plaisir…
Moi — Ce n’est pas comme ça qu’elle va apprendre que ne peut pas tout avoir dans la vie.
Nicole — Elle va l’apprendre bien assez tôt – si ce n’est pas déjà fait.
Moi — Genre si elle se convertit à l’islam et veut aller enseigner avec un voile dans une école primaire ?
Nicole — Arrête donc. Cette face à claques de Legault l’a dit, ce dossier est maintenant clos. Et puis, laisse-moi donc gâter un peu ma seule petite fille pendant que je suis encore vivante et que j’en ai les moyens!
Moi — Meh.
Nicole — On croirait l’entendre.
Moi — C’est l’hérédité dans toute sa splendeur. De qui je tiens, d’après toi?
Nicole — Meh.
Moi — C’est ce que je disais.
Nicole — Parlant de petits enfants… comment va la grossesse de Judith?
Moi — Bien, bien… C’est le début du dernier trimestre. Il est maître du coup de pied, ce petit monstre. Oh, et pendant que j’y pense, elle et Ousmane reçoivent chez eux le vingt-quatre et tu es invitée.
Nicole — C’est sûr que j’y serai. Déjà que je suis triste d’avoir manqué le shower… et que je serai en Floride pendant l’accouchement.
Moi — Tu sais bien que je vais te le montrer le bébé par Skype dès que je peux.
Nicole — J’y compte bien ! Est-ce que Judith veut que j’apporte quelque chose, pour Festivus.
Moi — Non – et j’insiste pour que tu m’apportes rien.
Nicole — Mais je vais quand même apporter…
Moi — Non!
Nicole — Juste une…
Moi — NON!
Nicole — Ok, ok… J’offrirai mes confitures et mon petit pot de beurre à quelqu’un d’autre.
Moi — Tu as intérêt à te présenter avec rien d’autre, mère-grand, sinon je vais m’assurer que le grand méchant loup te mange.
Nicole — Arrête, c’est presque tentant. Ça fait tellement longtemps qu’il ne m’est rien arrivé, depuis la mort de Jacques…
Moi — Là, je viens de penser à la vie sexuelle de ma mère et je suis grossed out.
Nicole — Tu as toujours été trop sensible, ma chérie. Tu te rappelles quand nous vivions en commune sur la terre à Saint-André-Avellin et que tu m’avais surprise avec…
Moi — LA LA LA LA LA J’AI RIEN ENTENDU OK BYE ON SE REPARLE !