Moi — Alors voilà. J’ai reçu les copies de mon dernier bouquin.
Elle — Oh ! Il est BEAU !
Lui — Et il sent encore l’encre fraîche.
Elle — Et regarde ces illustrations ! Ouaou !
Moi — Je vous ai fait chacun une dédicace, mes trésors.
Elle — « À ma chérie adorée, mon inspiration constante et ma source inépuisable de mots doux invraisemblables. » Aon ! Aon !
Lui — Et la mienne dit : « À toi, mon tendre amour si dévoué, si généreux, ces sept-cent quarante et un amants – parmi lesquels tu es le plus magnifique, le plus inoubliable. » Je suis terriblement flatté et ému.
Elle — Oui, c’est tellement chou ! Viens que je t’embrasse !
(Illes m’embrassent tendrement.)
Lui — Pourquoi écris-tu toutes tes dédicaces à l’encre violette ?
Moi — Quand j’étais plus jeune et que je commençais à écrire de la littérature érotique, je vouais un véritable culte à Pierre Louÿs. Quand j’ai appris que tous ses manuscrits étaient écrits à l’encre violette… ben monkey see, monkey do.
Elle — Pierre Louÿs ? Le pédophile orientaliste antidreyfusard ?
(Silence.)
Moi — Chaque fois que tu me surprends avec ton érudition, on dirait que c’est toujours dans l’unique but de me niaiser.
Elle — Moi aussi je t’aime, ma bibiche en su-sucre !
Lui — Ce serait chouette si tu pouvais nous en lire des passages.
Moi — Je pourrais faire mieux encore et vous le lire au complet.
Lui — Là ? Tout de suite ?
Moi — Pourquoi pas ? La soirée est jeune et ça devrait prendre quoi… une heure ?
Elle — OUIIII ! Fais-nous la lecture ! Je vais chercher des coussins pour qu’on soit plus confortables !
Lui — Et moi, une bonne bouteille, pour que tu puisses garder ta gorge bien hydratée.
(Quelques minutes plus tard, je suis assise dans le fauteuil et je commence la lecture pour mes amours langoureusement étendus sur les coussins.)
Moi — « Richard m’a écrit un court acrostiche pour me déclarer sa flamme, sans savoir que je tiens cette forme fixe pour la plus médiocre d’entre toutes. Isidore récitait des poèmes de Louis Aragon chaque fois qu’il me baisait ; Au début, je trouvais ça surréaliste, mais à la fin, c’était juste convenu. Emmanuel a insisté pour que je crie le plus fort possible pendant qu’il me baisait pendant que son coloc évaluait ma performance avec un sonomètre… »
(Plus de trois heures plus tard, après bien des fous rires, des cris d’indignation amusée et des mots d’encouragement, je termine la lecture, épuisée et tremblante, la voix brisée et le visage baigné de larmes.)
Moi — « Je fus littéralement déchirée par l’orgasme. Quand je me relevai, se tenait à côté du rhinocéros une copie de moi-même, un homoncule né de la moitié gauche arrachée de mon corps. Elle reprenait forme en faisait des craquements mouillés, comme un scarabée qu’on écrase du talon. Je voyais sa jambe et son bras manquants repousser lentement, ainsi que le reste de son visage. Lorsqu’elle retrouva son intégrité, elle se tourna vers moi et me dit, avec ma propre voix : « Va-t’en et ne reviens plus. Je te laisse le sexe, je n’en aurai pas besoin. Je garde le cœur et je reste ici, avec lui. » En me réveillant, je fus prise de panique, parce que je n’arrivais plus à prendre mon pouls.
(Après un moment de silence, il se lève et me prend dans ses bras. Elle vient nous rejoindre et pleure avec nous.)
Lui — Je n’ai plus qu’une seule envie maintenant, c’est qu’on aille tout de suite au lit pour te caresser les cheveux jusqu’à ce que tu t’endormes.
Moi — (En reniflant et en essuyant une larme du revers de la main.) Je vois déjà venir la critique. Amants : le livre érotique qui tue le sexe.
Elle — … et qui fait tomber en amour.
comme à l’habitude j’attends avec impatience chacun des épisodes 🙂
que j’aimerais que l’on prenne le temps de me faire la lecture dans le creux de l’oreille … lecture érotique bien sur … le livre d’une main et de l’autre les caresses 🙂
merci xxx
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